21/12/2008


Difficile métier que celui de guitar hero. Popa Chubby, individu haut en couleur s’il en est, est l’un des derniers légataires d’un certain esprit blues et rock’n’roll, option guitare. C’est la crise et c’est un Bataclan incomplet, avec fauteuils, et balcon fermé (sauf pour quelques fins obstinés qui ont réussi à s’y faufiler), qui l’accueille pour le deuxième soir de suite.


Popa débarque à 20h15, avec ses tatouages, ses kilos et son chapeau, en trio, avec batteur et bassiste, et enfourche sa guitare. On jurerait parfois assister à une démonstration de la Fender Stratocaster par un de ses éminents émissaires, la preuve par six cordes, s’il en était encore besoin, que cet engin est La guitare ultime. On dirait pourtant un jouet entre les grandes paluches de cet imposant personnage. Son jeu est proprement hallucinant, brillant lorsqu’il reprend certains morceaux inscrits dans la légende par les doigts de fée de saint Jimi Hendrix, patron des guitaristes à qui il rendait hommage il y a deux ans avec le triple album « Electric Chubbyland » : Hey Joe, Manic Depression et Little Wing ne manquent pas de panache et font leur petit effet… Il s’offre également un clin d’œil à Led Zeppelin, où s'illustrait Jimmy Page, qui n’était pas la moitié d’un manche non plus. Chaussé de Converse Chuck Taylor, il n’hésite pas à appuyer sur le champignon de sa pédale wah-wah pour des solos débridés et hurlant : Cry Baby, c’est bien cela !


Photo : Florian Garcia


Au bout d’une heure intense de sueur, de grimaces et de langue tirée, devant un public sagement assis, sagement initié (moyenne d’âge relativement élevée), sagement fan et sauvagement enthousiaste (demandez un « yeah » ou de battre des mains, et Monsieur est servi), au bout d’une heure donc, Popa Chubby invite un premier larron, ami parisien joueur de pedal steel guitar, puis un violoniste, ainsi que sa copine (sa femme ?) au chant et à la basse, tandis que le bassiste se saisit d’une guitare acoustique. Tout ce petit monde est là pour défendre l’album fraîchement paru – et palme de la pochette de mauvais goût : « Vicious Country ». Et dans un premier temps cela y ressemble en effet : le guitariste continue tout bonnement sur sa lancée, donnant dans une country sale, bluesy, rock. Ce sont surtout les rythmes et l’aigrelet violon qui rappellent les racines d’une certaine musique américaine. Seulement voilà, l’ennui gagne rapidement et on a de plus en plus l’impression d’assister au concert d’un vieux groupe de bal lambda en plein milieu du bayou. A vrai dire, si Popa Chubby capte logiquement l’attention et la lumière, ses acolytes ont un déficit flagrant en charisme. Et si madame Chubby se défend finalement pas si mal à la basse et au chant, ce n’est pas une raison pour s’habiller n’importe comment (bottes de moto, collants et tutu noirs), et elle a le malheur de faire penser à votre voisine – oui, celle qui sort son caniche tous les soirs – dont vous découvririez stupéfait la double vie : tatouages et rock garage !

Difficile donc, de rester mobilisé, d’autant qu’aucun morceau ne se détache réellement (à part une reprise de Gloria, à la fin, qui soulève, diantre !, le public) et qu’on approche les deux heures et demie de concert. Pour ne rien arranger, on assiste ensuite à une touchante réunion de famille puisque les Chubby encadrent leurs deux filles – qui ont hérité de leur popa une certaine propension à l’embonpoint – l’une au violon, l’autre à la trompette, pour une chanson à quatre voix tout à fait anecdotique.

Le « show » finit par toucher à sa fin, et, la guitare raccrochée, il vient comme souvent à son habitude prendre la place de son batteur pour une petite démonstration récréative, avant que ce dernier ne le rejoigne à nouveau pour une partition percussive à quatre mains, alors que déjà la salle se rallume…


On quitte les lieux dubitatif, partagé entre l’immense respect qu’inspire le guitariste et l’indifférence que procurent ses errements avec son groupe du moment. Le salut se trouverait peut-être dans un super-groupe avec des musiciens à sa mesure qui le pousseraient à composer de grandes chansons. Peut-être…


F.G.


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