13/01/2009


On ne se lasse pas de le répéter, les Black Angels sont un des trucs les plus hallucinants (hallucinogènes ?) de ce début de siècle. La question étant maintenant de savoir, quelque six mois après leur précédent concert parisien, où en sont les cinq Texans, et comment leurs « trips » musicaux supportent le passage du petit club intime de la Maroquinerie au grand Élysée Montmartre.

La comparaison entre les deux shows est d’autant plus inévitable que ce sont à nouveau les Molly’s qui sont en première ligne. Et sans faire pâle figure : force est de reconnaître que ce quatuor s’en sort honorablement et prouve qu’une alternative est possible dans nos contrées fromagères. Le guitariste joue les bellâtres souples, impliqué mais appliqué sur sa guitare Burns, le chanteur à la Telecaster n’en fait pas des caisses et la section rythmique assure l’assise avec la discrétion consacrée. La seule ombre qui plane sur le groupe est celle du Black Rebel Motorcycle Club, jamais très loin, jusque sous la capuche du chanteur : on a parfois l’impression de découvrir des faces B du trio américain, interprétées par un tribute band… Il y a pire me direz-vous…


Photo : Florian Garcia


A l’heure où débarquent les troupes d’Austin, la salle a fini de se remplir, signe que la rumeur – ou tout simplement la musique – a fait son chemin… Puisque l’Amérique de Bush s’est enlisée dans un second Vietnam, les Black Angels ont pris les armes pour une sainte guerre psychédélique. Le contingent n’a pas changé : Alex Maas, en barbu cheminot, la tête enfoncée dans sa casquette, est toujours ce sombre prédicateur, avec maracas et tambourin en guise de sceptres. Christian Bland apparaît comme un fin stratège, architecte sonore de l’apocalypse avec sa Rickenbacker ; Nate Ryan et Kyle Hunt sont de redoutables et indispensables mercenaires embusqués, et Stephanie Bailey, une brute sauvage fantasmagorique à la chevelure d’or, créature diabolique déchaînant le tonnerre des tambours guerriers. Parfois, dans le halo de lumière qui l’entoure, on ne sait plus très bien si la fumée est artificielle ou si elle n’émane pas de ce corps tendu, aux mouvements amples et percutants.


Photo : Florian Garcia


D’entrée c’est la prise de risque : on ose un nouveau titre, avant de retomber sur Mission District et de poursuivre les opérations. Les désormais incontournables Black Grease, Better Off Alone, Science Killer, sont naturellement au programme, comme autant d’évidents hymnes souterrains. Et toujours cette incommensurable propension à produire un rouleau compresseur sonique, monolithique, vrombissant et strident à la fois. Et comment ceux-là pourraient-ils s’ennuyer ? Les instruments passent sans cesse de mains en mains : en une heure et demie, on aura vu Stephanie tabasser sa batterie et en venir à bout, réajuster en conséquence – et en même temps qu’elle joue ! – ses pieds de cymbales défaillants sous ses coups, matraquer le fameux tom basse toujours présent en complément et enfin enfourcher la basse de ses petits camarades, Nate passant aisément, au besoin, de la basse à la guitare puis derrière les fûts lorsque Stephanie n’y est plus ; on aura vu Kyle sur un clavier, à la guitare, à la basse et aux percussions, Christian tenir la guitare mais aussi la basse, et finir à la batterie ; Alex tantôt au tambourin, tantôt à la basse, tantôt aux maracas, tantôt à l’orgue distordu, ainsi qu’à la guitare, vous suivez ? Impressionnants.

Si le groupe ne semblait pas avoir complètement ses marques en début de concert, on assiste à une véritable montée en puissance. Sur You On The Run, ce ne sont pas moins de quatre guitares qui font littéralement exploser la chanson, et alors qu’on croit avoir tout vu, une nouvelle composition des plus prometteuses vient faire son petit effet : River Of Blood.


En rappel, Manipulation retentit, chantée en alternance par Christian et Alex, avant de laisser place à Never/Ever en guise de final. Le groupe quitte la scène, et Alex Maas reste seul derrière son orgue pour quelques derniers instants. Mais couvre-feu de l’Elysée Montmartre oblige, le concert n’ira malheureusement pas plus loin. Après cette nouvelle séance d’hypnose collective, certains seraient prêts à parier leur chemise humide de sueur que les Black Angels sont l’avenir du rock, ici et maintenant.


F.G.


SETLIST

Bad Vibrations

Mission District

Black Grease

Sniper At The Gates Of Heaven

Better Off Alone

Haunting

Science Killer

Dhir Rishi (Deer Ree-Shee)

Young Men Dead

You On The Run

River Of Blood

You In Color


Rappel :

Manipulation

Never / Ever


(Thanks to Stephanie)


Photo : Florian Garcia


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