29/01/2009


L’année 2009 sera féminine. Avec de longues jambes. Et pas question d’attendre. Rendez-vous, donc, en ce samedi de janvier, dans une Maroquinerie où les foules semblent avoir oublié de se rendre, pour un concert découverte (remercions la magie d’Internet), avec Underground Railroad et leurs invités : Joe Gideon & The Shark, un patronyme qui, on en conviendra, ne s’invente pas. Tout ce petit monde a fait le voyage directement depuis London, Angleterre.


Lorsque l’on parle de duo blues-rock, on pense bien sûr aux White Stripes, Kills et autres Black Keys. Eh bien Joe Gideon & The Shark en sont les cousins putatifs, avec Gideon dans le rôle de Joe, à la guitare, et sa sœur Viva dans le rôle du requin à la batterie. Enfin requin, façon de parler, car cette grande et belle brune à frange se pointe sur scène dans un pyjama léopard ! On n’a pas idée. Un spectateur non averti aurait pu craindre le délire façon comédie musicale Roi Lion ou que sais-je, mais loin s’en faut. Non, la demoiselle s’affaire sur une batterie minimaliste et joue dans un style Kung Fu particulièrement martial. Entourée de percussions diverses, d’un clavier et de micros, elle se charge de sampler quelques accompagnements, le tout régulièrement ponctué de petits cris bestiaux et à propos. Son alter ego joue quant à lui la carte du riff blues simple et sale sur une vieille Fender Jaguar, et parfois sur une basse au feed-back facile, prêchant ses textes à la manière d’un Lou Reed naïf – ou pas encore totalement cynique. Le résultat est tout bonnement jubilatoire, inventif et diablement efficace, avec un côté homemade attachant. Pour le public c’est la gifle – aller et retour, la gifle –, mais après six ou sept titres, la paire débarrasse malheureusement déjà le plancher et cède la place.


Une fois le changement de plateau opéré, c’est au tour des Français de Londres d’Underground Railroad de prendre les commandes, dans une salle qui a fini par se peupler honorablement. On a parfois la jouissive sensation d’avoir affaire aux héritiers européens de Sonic Youth, comme si la capitale britannique était devenue une antenne de la noise new yorkaise. D’ailleurs le bassiste JB, grand échalas dégingandé – monté sur Converses Chuck Taylor s’entend – arbore une chemise de bûcheron de mise, et une coupe au bol de rigueur. Celui-ci s’énerve vigoureusement sur sa basse et pousse parfois des hurlements de dément. A la batterie, Raphael apparaît comme le leader de cette bande de nerds. Son jeu est énergique et puissant, usant largement du tambourin entre ses roulements. Il s’offre également quelques intermèdes au clavier et harmonise de la plus belle des manières avec la guitariste Marion avec qui il se partage les parties de chant. Celle-ci peut passer en un clin d’œil de doux susurrements à des feulements rageurs dignes d’un Kurt Cobain – auquel elle a également emprunté la guitare, la fameuse Jagstang, dessinée par le regretté blondin de Seattle, au son rêche, toutes griffes dehors. A ce stade, le larsen n’est pas une option, mais un parti pris, et la demoiselle n’est pas à une mélodie malsaine près. Sur certains morceaux, le trio accueille enfin une violoncelliste, rencontrée, paraît-il, dans un pub la semaine précédente, qui s’intègre discrètement dans le vacarme ambiant.

Raphael présente chaque chanson, rappelant de quel album ou EP elles proviennent (« Sticks And Stones », leur second effort vient de paraître), et communique son plaisir d’être là, à la Maroquinerie, et pas ailleurs. Tout à fait charmants et polis, ils ont tout des délicieux amis que votre maman serait ravie de recevoir à la maison. Si seulement elle savait ! C’est que ces trois-là sont surtout capables d’une sauvagerie musicale des plus carnassières. Le set s’achève dans un final apocalyptique destroy et le groupe s’éclipse sous les flashes du stroboscope avant de revenir pour une dernière chanson, rappel oblige.


Ces deux groupes souterrains font partie de ces trésors cachés qui se revendiquent comme un secret, qui se passe de bouche à oreille de connaisseurs. Mais attention, la rumeur pourrait bien enfler, il va falloir les avoir à l’œil.


F.G.


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